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Fabrice Tsiassa, Mettre à nu la modernisation en peinture

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Par Yanne Lomelle

Le talent de Fabrice Tsiassa, jeune peintre originaire de Sainte-Marie n’est plus à prouver. Même si toute vérité n’est pas bonne à dire, il est de ceux qui pensent que les mensonges doivent être dénoncés. « Modernisation et mensonge » sont deux thèmes qui reviennent régulièrement dans ses œuvres.

 

Dis-moi ce que tu peins et je te dirai qui tu es

Du haut de ses 38 ans, Fabrice Tsiassa semble avoir déjà vécu toute une vie en tant que peintre. Comme la plupart des artistes malgaches, il a appris les techniques de l’art sur le tas. Dans les rayons de la bibliothèque de l’Alliance Française de Toamasina, il a lu les maigres ouvrages qui traitaient l’art de la peinture. Insatiable, rien ne semble freiner son envie d’apprendre. Ayant pris goût pour le troisième art depuis sa tendre enfance, il a commencé en tant que dessinateur,  puis portraitiste avant de mettre en place son atelier.  Par la suite, il a sillonné les grands hôtels de la côte-est de Madagascar afin d’exposer ses œuvres lui permettant ainsi de vendre des toiles. En 2018, il a pu jouir d’une résidence artistique dans la ville d’Antananarivo. Un mois durant lequel il a pu oublier les tracas de la vie quotidienne et se consacrer entièrement à sa peinture. C’est ainsi qu’est née une série de dix tableaux s’intitulant modernisation et mensonge. Représentation sans retouche de la nature humaine qui est embourbée dans la civilisation au point de s’habiller en permanence d’un masque de mensonge et de faux semblant. Une contrainte de l’évolution transposée à la réalité malgache : un délice pour les yeux et un éveil de conscience. Nous allons donc décortiquer deux de ses œuvres pour mieux comprendre l’artiste.

 

Mère nourricière et Dahalo

Violente représentation de la réalité malgache,  à travers son tableau « mère nourricière », Fabrice Tsiassa parle de la terre-mère dont la richesse est inestimable. Un lait maternel qui ne nourrit pas son enfant. Grâce à sa peinture, il met en scène la souffrance de la population  qui est dans l’obligation de se résigner à voir de tierces personnes profiter de ce qui lui revient de droit.

Grâce à son deuxième tableau intitulé « dahalo », l’artiste parle d’une réalité devenue un phénomène social dans le pays. L’insécurité et le vol de zébu a bouleversé l’ordre social dans la Grande Ile car considérer en zone rurale comme la plus grande des richesses, les zébus sont devenus la cible des malfaiteurs. Une fois de plus, le peintre ne s’est pas arrêté à reproduire une situation et a décidé d’évoquer la corruption autour de ce fait social. Les voleurs de zébus, appelés communément « dahalo » ont muté en véritable bande organisée grâce aux soutiens des politiciens véreux.

Fabrice Tsiassa considère que la population malgache a détourné les yeux sur la réalité du pays trop longtemps et en appelle à la conscience collective afin de se souvenir de ses racines malgré les pressions de la modernisation. Un beau message transposé sur toile.